Études

Filière automobile : des leviers à saisir

Face aux évolutions, plusieurs sujets seront, selon nous, déterminants pour l’avenir de la filière automobile en France.

Moteur de voiture

Le degré d'intégration locale

Lorsque les constructeurs s’implantent dans de nouvelles régions, ils cherchent à mettre en place une filière et s’engagent à s’approvisionner largement auprès des sites locaux de leurs fournisseurs. Ces taux d’intégration locale sont généralement compris entre 60% à 90%.

Rien de tel en France où l’intégration de la filière semble aller dans le sens inverse ! Nombre de dirigeants témoignent des pressions qu’exercent sur eux leurs clients afin qu’ils confient la production à un site européen à bas coût, quand bien même des conditions de coûts équivalentes sont proposées pour une fabrication en France. Ces témoignages corroborent la tendance baissière communiquée par PSA, qui envisage de descendre à 50% la part de ses approvisionnements sur le territoire national, tandis que Renault reste discret sur ses chiffres.

Pourtant, la généralisation d’une production en flux synchronisés, promue par les constructeurs, plaide en faveur d’une proximité renforcée entre sites clients et sites fournisseurs. Cette évolution pourrait logiquement conduire au renforcement du taux d’intégration locale des sites d’assemblage. Il s’agit d’un levier pour ancrer durablement les entreprises de la filière.

Batterie de voiture électrique

Des politiques d'achat responsables

Fort des alliances nouées par PSA (avec Opel/ Vauxhall) et Renault (qui avec Nissan et Mitsubishi, a pris la première place mondiale en 2017), les politiques d’achat se concentrent sur des acteurs de taille importante, agissant au niveau international.

Les perspectives des fournisseurs indépendants et/ou de petite taille, localisés en France, s’en trouvent fragilisées... Pourtant, ces entreprises recèlent de trésors de savoir-faire qu’il s’agirait de ne pas balayer au motif d’un modèle d’organisation qui ne soit pas standard !

Face à la complexité de telles situations, l’intelligence collective de la filière va être mise à l’épreuve. Sera-t-elle capable de construire des solutions de consolidation et de diversification des activités et des sources de financement pour renforcer le potentiel de pépites esseulées ?

Les stratégies d'internalisation

La mutation des systèmes de propulsion, leur hybridation, la connectivité et l’autonomisation des véhicules sont désormais au centre des préoccupations en R&D et le deviendront en production. Ces sujets mobiliseront une part importante des moyens d’investissement et de développement des grands acteurs de la filière. Toutefois, s’ils ne les considèrent pas suffisamment stratégiques, ils pourront éventuellement les confier à des fournisseurs et partenaires (venus parfois d’autres horizons). Or, Il existe un enjeu fort d’intégration et de valeur attaché à ces composants et sous-ensembles, et donc sur l’opportunité qu’ils soient produits en France.

Si PSA a décidé d’internaliser les moteurs électriques, pour les boîtes de vitesses automatiques en plein essor (au détriment des boîtes manuelles) il ferait le choix de confier leur production au japonais Aisin... qui ne fabriquera pas nécessairement en France.

Par ailleurs, si les usines venaient à moins produire, les constructeurs pourraient, dans une phase de regain de productivité, être tentés de réintégrer des productions qui, jusqu’ici, faisaient vivre certains sous-traitants et leur territoire.

Construire les compétences du véhicule de demain : Un enjeu de filière

En tout état de cause, les entreprises de la filière doivent se positionner au regard de ces enjeux. Ils savent identifier leurs besoins en compétences, même s’ils restent prudents sur le nombre d’emplois. L’étude de l’Observatoire de la Métallurgie sur les métiers d’avenir dans la filière mérite d’être discutée, avec des enjeux sur les formations et les conditions de travail qui justifient d’y associer étroitement les organisations syndicales.

La filière automobile en France est aujourd’hui sur une trajectoire de rétrécissement. Elle dispose toutefois des atouts pour se positionner sur une trajectoire de redressement, qui sache mobiliser les différents acteurs de la filière. Cela suppose d’investir non seulement dans plus de productivité, mais aussi dans des activités nouvelles, de miser sur un renforcement des liens entre les parties prenantes, et de contribuer à développer les compétences d’avenir, facteur majeur de différenciation et de compétitivité pour aujourd’hui et pour demain.

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