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Energie et numérique : double transition… Double révolution ?

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L’ensemble de l’économie est percutée par les évolutions issues des technologies du numérique. Automatisation, intelligence artificielle, réalité augmentée, internet des objets… autant de mutations, qui, combinées entre elles génèrent des transformations considérables dans tous les domaines. Celui de l’énergie ne fait pas exception, en particulier la filière électrique.

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Production, transport, distribution, consommation… Toute la chaîne de valeur de l’électricité est bousculée

Il est de notoriété publique que le secteur de l’électricité connaît une véritable révolution, avec en particulier la multiplication de sources d’énergie intermittentes et décentralisées, notamment avec le développement d’électricité d’origine solaire ou éolienne ; mais l’on mesure moins l’intervention des technologies du numérique.

Les activités de maintenance sont ainsi en passe d’être fortement transformées, avec le développement de la « réalité augmentée », ou encore avec le développement du recours aux drones. Les premiers jalons de la maintenance prédictive se posent : la multiplication des capteurs permet une meilleure connaissance du vieillissement des matériaux et composants, et donc l’allongement de leur durée de vie. EDF réalise également des jumeaux numériques de ses réacteurs qui visent à « réduire les temps d’arrêt pour maintenance grâce à une meilleure préparation des interventions » (l’Usine Nouvelle 2/11/2018).

Du côté de la demande, les changements sont également importants : développement des véhicules électriques, de bâtiments connectés, de l’industrie du futur... Quant au consommateur, il peut désormais, avec son smartphone, suivre voire maîtriser sa consommation à distance ; tout comme il peut désormais changer d’opérateur en quelques clics…  Pendant que ses consommations sont le plus souvent télérelevées.

Dans ce contexte, comment assurer en permanence l’équilibre entre l'offre et la demande ? Car l’électricité ne se stocke encore que très peu... Les « smarts grids » ou « réseaux intelligents » entrent en jeu : la numérisation des réseaux devrait aider à optimiser l’acheminement de l’électricité entre un nombre croissant de producteurs pour certains intermittents... et des millions de points de consommation sur tout un territoire.

Au-delà des enjeux techniques et technologiques, les questions autour des « données » sont nombreuses et sensibles

Le volume de données collectées et disponibles croît de manière exponentielle : comment et où les stocker ? Comment les organiser, les traiter, les croiser, les analyser, les rendre intelligibles ? Comment les rendre accessibles à celles et ceux qui en ont besoin —parfois en amenant des systèmes différents à communiquer entre eux— ? Et comment les protéger, et protéger celles et ceux qu’elles concernent, personnes et entreprises, notamment ? Autant de questions qui se posent en premier lieu aux « data scientists », compétence particulièrement recherchée en ce moment. Mais la question n’appelle pas seulement des réponses d’ordre technique et se pose à l’ensemble des organisations, comme des citoyens.

Les enjeux et impacts potentiels de cette double révolution pour les salariés sont nombreux

Toutes ces évolutions sont porteuses de transformations elles aussi importantes dans les organisations de travail. On a déjà assisté au regroupement et parfois à l’externalisation de certains services, notamment dans les fonctions support (dans des centres de services partagés), externalisations rendues possibles par le développement des moyens de communication. Demain l’intelligence artificielle risque de transformer encore davantage ces métiers en rendant possible l’automatisation de certaines tâches. Ainsi les « chatbots » limiteront de plus en plus le recours à des opérateurs. On peut aussi se demander pour les équipes de maintenance, comment sera prise en considération demain leur connaissance fine des terrains, issue de nombreuses années d’expérience. Les contenus des emplois sont appelés à évoluer encore fortement. La question du volume des emplois constitue évidemment un enjeu majeur. Mais l’avenir du travail suscite tout autant des questions.

Demander de l’information, des moyens spécifiques de formation et d’accompagnement : un moyen de limiter les inquiétudes

Transformation de l’économie, transformation des organisations, transformation des contenus du travail, transformation de l’emploi… Comment agir et peser dans ce qui ressemble à un tourbillon, quand on représente les salariés ?

L’attention à l’évolution des organisations et des relations de travail est primordiale : les nouveaux moyens de communication permettent le développement des interventions à distance ou du télétravail. Un progrès sans doute, mais qui peut aussi à terme être porteur de desserrement de liens au sein des équipes, de perte de solidarité et d’isolement. Il y a là un équilibre à trouver.

La question de la collecte, du traitement, et de la protection des données nous semble être à prendre en considération dès que possible : l’intérêt croissant des géants du numérique pour le secteur énergétique n’est précisément pas… désintéressé.

Demander de l’information, bien sûr : en particulier interpeller la direction quand elle présente ses orientations stratégiques. Il est en effet désormais difficile d’imaginer que le numérique ne soit pas un sujet porté au plus haut niveau (on voit d’ailleurs plus fréquemment des postes de directeurs de la stratégie/transformation numérique, parfois intégrés aux plus hauts niveaux de décision). Par ailleurs, la consultation sur les orientations stratégiques porte sur les conséquences de la stratégie sur l'emploi, mais aussi sur l'organisation du travail.

L’ampleur des transformations à l’œuvre peut aussi justifier d’être consulté au titre de l’introduction d’une nouvelle technologie, quand on se situe bien en amont du projet (et de la consultation qui sera ensuite organisée à ce titre).
Parce que la technologie n’est pas neutre et que ses effets sont potentiellement considérables sur le travail, son organisation et sur le volume des emplois, il apparaît primordial de négocier la mise en œuvre des technologies numériques : l’introduction de robots peut servir à réaliser les tâches les plus pénibles afin de redéployer les salariés sur d’autres tâches mais les robots peuvent aussi remplacer (tous ?) les humains dans une série de fonctions. Une intelligence artificielle peut être utilisée pour aider un conseiller à trouver rapidement de l’information, mais elle peut aussi servir à remplacer des humains. Dans un cas comme dans l’autre, il n’y a aucune inéluctabilité, mais des choix à opérer. Autant que ceux-ci soient le fruit d’une négociation plutôt que d’être brutalement imposés.

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